God save the gouines.

Si je ne me suis jamais mise à l'orgue, c'est parce que :

J'aime ce qui est strident. Ce qui grince, ce qui geint, ce qui crisse comme les ongles d'une insupportable prof de primaire sur un tableau noir (vert foncé en réalité, mais bon, l'imaginaire collectif est ce qu'il est). Le genre grande, maigre, sapée en tailleur, avec d'ignobles lunettes carrées comme les miennes, un rouge à lèvres méga rouge étalé sur une surface ridiculement fine, les joues creuses et la mâchoire anguleuse, le menton agressif, le grand jeu, un stéréotype, presque un paradigme.
J'aime ce qui est lourd, massif, redondant, lassant, la machine à laver à l'essorage, un marteau-piqueur, n'importe quelle scène d'Un Pont trop loin, n'importe quel morceau d'Angerfist, n'importe quel brainwasher.

Osons la comparaison : ceci et celà. Assez similaire, en fait. Que les puristes m'écorchent, je n'en ai cure.

Partant de là, je me demande pourquoi les gens écoutent encore Portishead ou Massive attack (tout particulièrement quand il s'agit de s'envoyer en l'air dessus). Je veux dire, c'est très bien Portishead et Massive attack, j'en écoute très souvent sous la douche. Simplement chiant à la longue. Lisse, voluptueux ok, mais dans des draps blancs en soie, pas de pli, pas de tache, parfumés à la lavande. Un soupçon d'engagement quand-même, car l'innocence pure ne paie plus des masses depuis les derniers jours de l'Inquisition.
Fascinante thématique que celle-ci, j'y reviendrai un de ces quatre.
Ces charmants grincements chantent une féroce mélodie à mes petites oreilles (que je n'ai pas décollées bien qu'elles le méritent). Il faut tout de même que ça soit mélodique, sinon où va le monde, hein, je vous le demande ? Reznor possède une putain de voix mélodique d'ailleurs. Sinon, sinon, sinon...

Point de mélodie dans la chanson.
Quoi de plus chiatique qu'une chanson ? Une innocente ritournelle, des rimes faciles, des paroles conçues comme l'horoscope de la dernière page du TéléLoisirs : il faut que ça soit suffisamment explicite pour toucher tout le monde tout en restant suffisamment implicite pour ne pas être restrictif. Redondant ça.
"En amour, vous aurez des surprises, cependant veillez à vous ménager, vous-même et vos proches. Travail, maintenez vos positions et tout ira bien. Santé, attention au dos". A qui ces choses ne parlent-elles pas, bordel ?
Et ben la chanson, c'est pareil : ça parle à tout le monde, n'importe qui se sent concerné, et c'est ainsi qu'on se retrouve comme ça, des centaines de glands connaissant les paroles par coeur, à les psalmodier avec conviction en les tenant pour paroles d'Evangile qui nous concernent personnellement, sisi j'te jure. Merdique.
Cali, une première preuve : je ne sais plus combien d'albums, toujours le même thème, l'amour elle est partie je la hais je suis malheureux bouhouhou.
Saez, une seconde preuve : de la chanson et rien d'autre (vous n'allez pas me dire que les putains de trois accords que grattent les ziquos de location derrière c'est du wack'n'woll ? Même pas d'la pop, je ne concèderai rien), qui parle d'amour, de haine, de mal-être existentiel vaseux, d'auto-flagellation et de pseudo-politique. La même que celle des mecs qui boycottent les cours "contre le gouvernement Sarkozy" en s'imaginant changer la France, le monde et les générations futures. Holy shit, tout ceci n'est pas là par hasard.
Indochine (n'ayons pas peur de nous attaquer aux monuments) : une boîte à rythme, un synthé, des paroles écrites au cours d'une bonne défonce à l'héro, relues le lendemain en pleine redescente, qui ne veulent jamais rien dire d'autre qu'absolument tout et n'importe quoi. Surtout, surtout qui se retiennent bien. Une étoile rouge apparaît dans le train, c'est la chinoise qui sourit pour mémoire... et un et trois et quatre au placard, un cinq à sept en haleine pour mémoire, houahouahoua ohlàlà, et Che et Che et Che Guevara... et caetera.
ALLO ?
Enfin Gainsbourg, mon petit dernier grand monument : sorti des quelques chansons qui l'ont popularisé, que l'on peut à la limite trouver intéressantes de part leur côté quelque peu piquant... de la merde en barre sur fond de reggae mâtinée aux voix féminines soupirantes du moment (Brigitte Bardot, je vous demande un peu). Bêrk, caca, what else ?

Faut que ça grince, faut que ça crisse, faut que ça hurle de l'inarticulé, faut que ça parle au corps et non à l'esprit. Superficiel, ego-centré l'esprit, comme les mots, tu peux leur faire dire et croire n'importe quoi, y a qu'à regarder les gens quand ils discutent. Gerbant. On s'en tape des paroles (je n'ai pas dit des voix). Point.

Toi aussi essaie chez toi : un bon gros son bien lourdingue au casque, crispe un coup tous tes muscles, tape dans le mur à poing fermé et crie une bonne fois.
Et oui...


Ca ne sert à rien, et ça fait peur au chien.

Ecrit par kaleria, le Dimanche 23 Août 2009, 06:02 dans la rubrique "# Niouzes".

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